Viols d’orphelins au Kenya, qui est coupable?

L’historienne américaine Andreana Prichard propose une opinion sur le phénomène de l’abus sexuel et physique des orphelins en Afrique, abus émanant des milieux religieux évangéliques. Elle revient en effet sur la condamnation aux USA du dénommé Matthew Lane Durham, âgé de 24 ans et qui a été condamné pour des abus sexuels sur des orphelins du Kenya.

Selon la presse, Matthew Lane Durham est issu d’une famille très dévote de la ville d’Edmond dans l’Oklahoma. En 2012, âgé de 17 ans, il passe son premier séjour comme volontaire à Nairobi, au Kenya. Il se rend alors dans une institution créée par un ressortissant américain qui y envoie des volontaires issus de la communauté religieuse de l’Oklahoma.

En 2014, plusieurs enfants se plaignent de son comportement, on cite une dizaine d’abus sexuels de sa part et dans un premier temps il reconnaîtra le viol répété de plusieurs enfants, âgés entre 4 et 15 ans. Il a été condamné à 40 ans de prison, aux USA, pour des viols et agressions sexuelles sur des mineurs de moins de 15 ans. Selon une loi américaine, il est illégal de se rendre dans un pays étranger pour y entretenir des relations sexuelles illicites avec des mineurs de moins de 16 ans. Cette loi visait initialement le tourisme sexuel dans les pays d’Asie où se pratique la prostitution des enfants, mais comme on le voit, il est question ici d’abus sur des enfants qui ne font pas partie de réseaux de prostitution.

Selon Andreana Prichard, la condamnation du violeur ne suffit pas, il y aurait lieu de tenir compte des fictions qui circulent depuis des siècles au sujet de l’Afrique et de l’aide supposée bienveillante de l’Occident. Ce sont les stéréotypes de la culture dominante qui rendent possible qu’un jeune homme sans compétence particulière puisse se rendre au Kenya pour y prendre en charge des enfants.

Andreana Prichard revient sur la notion de ce qu’est un « orphelin », un terme propre aux organisations judéo-chrétiennes occidentales. Se rendre en Afrique pour aider les veuves et orphelins a beaucoup de valeur aux yeux des Américains et cela peut avoir une importance sur votre CV académique. Or ce terme ne serait qu’une fiction, en Afrique de l’Est il n’existe pas dans la culture indigène, et depuis un siècle et demi l’aide humanitaire et des évangélistes serait surtout un moyen de propager la rhétorique évangélique et coloniale. La politique occidentale aurait même fragilisé beaucoup d’enfants, et créé ce que certains appellent le « complexe industriel des orphelins ».

L’historienne met aussi en question les missions humanitaires de court terme et le « volontourisme », qui feraient davantage de mal que de bien car ils ne visent pas des solutions a long terme. Quand des volontaires américains se rendent au Kenya pour repeindre des locaux d’une école, cela maintient au chômage les peintres locaux ; quand ils viennent entretenir des jardins, c’est autant de travail qui échappe aux jardiniers locaux. Les volontaires des orphelinats auraient même tendance a aggraver l’impact de l’accueil en institution.

Selon Andreana Prichard, il convient de cesser de propager des fictions selon lesquelles les Africains sont des déviants sur le plan religieux, aussi bien que sexuel. Sont coupables les pasteurs qui organisent du volontourisme de courte période selon elle, tout comme la logique qui privilégie les « bonnes intentions » sur les effets réels de leurs actions.

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